Seuil n°6 : l’ellipse ou le Mazzocchio

Huile sur toile (coton mixte) 130×162 cm

Pour toute information sur l’œuvre, prix, livraison etc. merci de vous adresser à : jf.ferbos@wanadoo.fr

En mouvement – Musique : Loïc Cavadore

Le mazzocchio est une coiffe de la renaissance que portaient les seigneurs Florentins. Il fut représenté à plusieurs reprises par P. Uccello (« Bataille de San Romano » et « Scènes de la vie de Noé »). L’artiste contemporain Jean Sabrier s’est également penché sur la singularité de cet objet à la géométrie parfaite et énigmatique. Il a été au centre de son travail pendant de nombreuses années. Quel sens donner à cette figure d’un point de vue artistique et philosophique ?

Le mazzocchio est un tore qui rassemble en sa forme elliptique un espace vide, une vacuité, soit un seuil, un lieu qui pourrait être celui de la métamorphose. Ce n’est en réalité pas seulement un lieu car il préfigure un mouvement de disparition qui opère précisément en cet espace bordé de figures parallélépipédiques, des carrés agencés dans l’espace. Ce trou bordé est donc le lieu même de la présence évanescente, celui du mouvement constitutif de la sublimation (cf « Cristal liquide », Jean Sabrier). En son sein opère « l’acte en soi » de création, acte mythique qui ne peut être, soumis aux règles du lieu et du temps, qu’une expérience de la perte. Comment ne pas constater que tout acte de création réussi est un acte perdu, une ellipse, qui produit dans sa suite la circulation d’une aspiration vitale? Son produit, parfois un tableau, n’en est que le reste, la présence atténuée, en suspension, d’une image en attente de regardeurs pour en poursuivre le mouvement narratif. Mais cette figure torique rassemble aussi en son sein une force de persuasion qui, usant de la mimesis, condense à elle seule un sentiment de perspective. Elle est la perspective en soi, en tant que représentant signifiant ayant une haute valeur symbolique. On pourrait lui trouver quelques affinités avec la figure du père, celle qui, une fois inscrite dans le langage, donne à son tour des perspectives, entretenant le ronron vital et créatif de la circulation imprévisible des mots pour dire et se dire, les mots pour être, être inscrit dans une narration singulière. Nous restons donc dans la fiction. Certains parleront de subjectivité. Pourquoi pas, il est bien question du sujet de l’inconscient dans cette remarque.

Le seuil peut alors prendre à son tour d’autres perspectives, d’autres significations, d’autres fonctions, tant qu’il demeure le lieu où la métamorphose concrétise un mouvement de transformation et de création. Il peut être le passage entre générations, entre pères et fils par exemple, un passage qui ne saurait se soustraire à l’épreuve de la relation à l’autre, fut-elle filiale.